- essorer
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1 ♦ Débarrasser (une chose mouillée) d'une grande partie de l'eau qu'elle contient. Essorer du linge avec une essoreuse. Absolt Son lave-linge essore bien, mal. P. p. adj. Linge essoré. — Essorer la salade.2 ♦ S'ESSORER v. pron. (repris XIXe) Vx ou littér. S'élancer dans l'air. « Parfois un aigle s'essorait du côté de la grande dune » (A. Gide). — Blas. Oiseau essoré, en plein vol.essorerv. tr. Débarrasser de son eau par torsion, compression, centrifugation, etc. Essorer du linge.⇒ESSORER, verbe trans.A.— Emploi trans.1. Vieilli. Exposer à l'air (une chose) en vue de la faire sécher. Il fallait bien cependant poser la planche à repasser sur son bureau et sur une autre table, faire essorer le linge sur des traverses dans l'entrée (HUYSMANS, Marthe, 1876, p. 62).— En partic. ,,Essorer une plate-bande. La retourner pour en faire sécher la terre trop humide`` (Ac. 1932).2. P. ext., mod. Égoutter, exprimer l'eau ou le surplus de liquide qui imbibe (quelque chose), cette opération se pratiquant manuellement ou mécaniquement. Essorer le linge; essorer des fromages. Après égouttage, la feuille était détachée de la forme puis essorée sous pression entre des feutres (Civilis. écr., 1939, pp. 6-5). Pour essorer les draps qu'on savonnait à la main, nous les tordions, cravatés au col d'un gros robinet de cuivre (COLETTE, Fanal, 1949, p. 177). Le rouleau sera imprégné de peinture dans le bac, puis essoré sur la grille afin d'être peu chargé (BONNEL, TASSAN, Trav. amén. mais., 1966, p. 138).♦ [P. ell. du compl.] Après cette opération [le trempage], essorez soigneusement avant de remettre le linge dans la machine pour le « lessivage ou barbotage » (Lar. mén. 1926, p. 199).♦ Emploi pronom. réfl., rare. Lorsqu'il vit ses chers alpinistes (...) en train de s'étriller, de s'essorer autour d'un énorme poêle en faïence (...) le président s'écouta frissonner (A. DAUDET, Tartarin Alpes, 1885, p. 172).— Au fig. ou p. métaph.♦ Vider (quelqu'un) ou (quelque chose) de sa substance, de sa vitalité. Jamais la pauvre guenille humaine n'a été pressée, battue, tordue, essorée, avec plus de force, de verve, de bonne humeur (A. DAUDET, Crit. dram., 1897, p. 266). Soixante navires, à Brest, au printemps de l'année, qui furent alimentés en matelots par une pression générale sur la Bretagne, très riche en naissances, mais qu'on essore (LA VARENDE, Tourville, 1943, p. 128).♦ Rare. Débarrasser de ce qui gêne, épurer. Crier un ordre empoisonnant qui va réveiller dans les guitounes une indignation tonique, ça vous remet d'équerre, ça vous essore le cerveau! (VERCEL, Cap. Conan, 1934, p. 13).♦ Arg. Extorquer (à quelqu'un) tout son argent, tous ses biens (cf. mettre à sec). Toute la petite épargne [= tous les petits épargnants] que notre pote avait essorée défilait [chez le juge d'instruction] (SIMONIN, Pt Simonin ill., 1957, p. 249).B.— Emploi pronom.1. Vieilli, rare. [Le suj. désigne un oiseau] Prendre son élan, s'élever dans l'air. Parfois un aigle s'essorait du côté de la grande dune (GIDE, Journal, 1895-96, p. 76).Rem. On rencontre ds la docum. l'emploi trans. (avec un compl. d'obj. interne) : un coq faisan partit avec fracas, essora son vol en fusée vers les cimes (GENEVOIX, Raboliot, 1925, p. 206) et l'emploi abs. Oiseaux qui essorent en cercles agrandis (MORAND, Air indien, 1932, p. 14). P. anal. Les avions prêts à essorer, sont rangés sur l'aire de ciment (ID., ibid., p. 85). Attesté uniquement chez l'aut. cité.— P. anal. Les balles des mitrailleuses s'essorent par-dessus la vallée, filent et filent par le col de Combres, avec une allégresse chantante d'oiseau (GENEVOIX, Éparges, 1923, p. 36).2. P. métaph. ou au fig., poét. [Le suj. désigne une pers., des sentiments humains] S'élever. Ainsi le poète, guéri De la torpeur qui l'étiole, Tout à coup s'essore et s'envole Vers le bosquet toujours chéri (VERLAINE, Poèmes divers, Intermittences, 1896, p. 227) :• On a besoin de symboles, de monuments, de statues, de drapeaux, pour fournir au sentiment quelque prise; des perchoirs pour permettre à ce qui s'essore de nos cœurs mais ne pourrait longtemps soutenir son vol, de se poser.GIDE, Journal, 1940, p. 39.— Au part. passé. Villes, au bord des mers, cités, au pied des monts, Leur tumulte essoré remplit vos horizons (VERHAEREN, Mult. splendeur, 1906, p. 56).Prononc. et Orth. :[
], (j')essore [
]. Prononc. [
(s)-] ds FÉR. 1768, FÉR. Crit. t. 2 1787, LAND. 1834 LITTRÉ [ss] et, à titre de var., ds BARBEAU-RODHE 1930 et ds WARN. 1968. Le verbe est ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. 1174-77 « aérer » emploi abs. (Renart, éd. M. Roques, 7011); ca 1200 « faire sécher » (R. de Montauban, 85, 24 ds T.-L. : Ne de fain qui ja fust au soleil essorés); 2. ca 1176 pronom. (d'un oiseau) « s'élever dans l'air, prendre son essor » (Cligès, A. Micha, 6352). Du lat. exaurare « exposer à l'air », composé du préf. lat. ex- et du subst. aura, ae « souffle, brise ». Fréq. abs. littér. :20. Bbg. PAMART (P.). Les Créations langagières d'André Gide. Vie Lang. 1973, p. 577. — SAIN. Arg. 1972 [1907], p. 194.
essorer [esɔʀe] v. tr.ÉTYM. V. 1200; « lâcher un oiseau », v. 1175; du lat. pop. exaurare, de ex- « hors de », aura « vent, air », et suff. verbal.❖1 Vx. Exposer à l'air libre pour faire sécher. || Essorer du linge, l'étendre après l'avoir blanchi. || « Faire essorer le linge sur des traverses dans l'entrée » (Huysmans, Marthe, in T. L. F.).2 Mod. Débarrasser par pression (du linge, une chose mouillée) d'une grande partie de l'eau qui s'y trouve. ⇒ Essorage. || Essorer du linge dans un linge sec, avec une essoreuse.0.1 Pour essorer les draps qu'on savonnait à la main, nous les tordions, cravatés au col d'un gros robinet de cuivre.Colette, le Fanal bleu, p. 177, in T. L. F.3 Agric. || Essorer une terre trop humide, la retourner pour qu'elle sèche. || Essorer des graines, des oignons, les sécher pour les conserver.4 Fig. et fam. || Essorer qqn, épuiser sa substance, ses ressources. — Argot. Prendre tout l'argent de (qqn). || Il s'est fait essorer par des aigrefins.➪ tableau Termes de blason.——————s'essorer v. pron.♦ (Vx ou littér., repris XIXe). S'élancer dans les airs (oiseau). — REM. Cet emploi archaïque doit probablement sa réapparition à la vitalité de essor.1 (…) je me trouvai néanmoins chez madame, en gros oiseau gris-bleu s'essorant vers les moulures du plafond et traînant l'aile dans les ombres de la soirée.Rimbaud, les Illuminations, XXXIV.2 Parfois un aigle s'essorait du côté de la grande dune.Gide, Feuilles de route, Biskra, 1896, in Journal 1889-1939, Pl., p. 76.3 J'aime que le chant s'en essore d'une manière toute naturelle, par une éclosion comme prévue; au début tout au moins du morceau, car, aussitôt épanouie, la mélodie éclate, et prend nettement le dessus, pour ne s'évanouir et se résorber à nouveau que vers la fin.Gide, Journal, 12 févr. 1929.——————essorant, ante p. prés. et adj.♦ Blason. Qui a les ailes à demi déployées, l'œil regardant le ciel. || De gueules à l'aigle essorante d'argent.——————essoré, ée p. p. adj.1 Linge complètement essoré.2 Blason. (Sens archaïque de essorer). || Oiseau essoré : oiseau en plein vol. Se dit aussi d'une tour, d'une maison dont le toit est d'un émail différent de celui du corps. || Château d'azur essoré de gueules.❖DÉR. (Au sens étym.) Essor. — (Aux sens mod.) Essorage, essoreuse.
Encyclopédie Universelle. 2012.